Interview de Madina Rival, maître de conférences en Gestion au Cnam

Innovation publique

Que signifie l’innovation publique ?

Selon le site Internet du Secrétariat général pour la modernisation de l’action publique, rattaché au Premier ministre et qui a labellisé nos formations, il s’agit d’une administration « qui promeut l’innovation dans les services publics, de la conception à la mise en œuvre des politiques publiques ». Il existe deux principales conceptions pour parvenir à cette innovation : dans la vision traditionnelle, il s’agit d’appliquer les outils issus du management dans les entreprises aux organismes publics ; dans l’approche pluridisciplinaire, on parle de co-construction de la décision politique par des acteurs issus du secteur privé comme du secteur public. Nous avons privilégié cette conception que nous jugeons plus moderne.

Pour vous donner un exemple concret d’innovation publique, primée cette année par l’Observatoire Territoria : dans le 9e arrondissement de Paris, la fédération nationale de l’immobilier (Fnaim) a proposé avec les riverains une action en collaboration avec la mairie pour notamment mettre en place un tri sélectif ou participer à la végétalisation de l’arrondissement… Ces innovations co-construites avec le privé vont permettre à des solutions plus efficaces et plus proches des besoins du citoyen d’émerger. L’innovation ne se limite ainsi pas au numérique.

Pourquoi former à l’innovation publique au Cnam ?

À travers la réforme territoriale, l’arrivée de l’open data, l’ouverture au secteur privé, l’apparition d’une culture de la performance, la pénurie financière, etc., l’administration territoriale a subi de nombreuses évolutions ces dernières années. Un certain nombre de personnes y sont en souffrance. Ces périodes de contraintes peuvent aussi devenir le meilleur moment pour se réinventer. L’organisation doit être résiliente. Pour cela, il est nécessaire de former les cadres territoriaux afin de leur permettre de s’adapter.

Ainsi, nous avons choisi d’ouvrir à la fois un certificat de spécialisation professionnalisant « Politiques et management de l’innovation publique dans les territoires » et une unité d’enseignement de niveau M2 « Innovation publique ». D’autres instituts comme Science Po, l’ENA (École nationale de l’administration) ou l’Inet (Institut national des études territoriales) offrent également des formations sur ce sujet. Néanmoins, le Cnam, par sa vocation, peut être un lieu intéressant. Il s’adresse en effet à des personnes qui n’oseraient pas aller dans des grandes écoles ou n’en auraient pas les moyens financiers. C’est la mise en application du credo de l’abbé Grégoire, fondateur du Cnam : « Il faut éclairer l'ignorance qui ne connait pas et la pauvreté qui n'a pas les moyens de connaître ». Notre valeur ajoutée est aussi d’être pluridisciplinaire. Nous nous appuierons sur les ressources transverses de l’équipe pédagogique nationale « Innovation » ainsi que sur la force du Cnam en région. Une conférence a déjà été organisée à Orléans. Ces formations sont aussi développées en contact étroit avec tout le réseau associatif et professionnel de ce domaine.

Peut-on différencier ces deux nouvelles formations ?

Elles ont des vocations et donc des profils d’auditeurs différents : le certificat de spécialisation « Politiques et management de l’innovation publique dans les territoires » s’intègre à un projet professionnel. Dispensés en FOAD hybride (à distance et en présentiel en cours du soir), les cours débuteront en décembre. Les élèves sont pour la plupart des cadres administratifs de la fonction publique locale, qu’il s’agisse de personnes souhaitant développer leurs compétences ou changer de métier. Nous allons travailler sur les problématiques de leurs collectivités afin d’aboutir à des solutions concrètes. Parmi les inscrits, d’autres profils se dessinent aussi : des personnes issues d’autres fonctions publiques ou en reconversion. Nous attendons aussi des élus, qui souhaiteraient comprendre les changements à l’œuvre dans leurs services. Notre volonté est d’avoir de petites promotions pour travailler en mode projets, de manière à faciliter leur accompagnement. Trois domaines majeurs de l’innovation publique seront abordés : le management, les politiques publiques et les transformations du numérique. Si les cours présentiels auront lieu au centre de Paris, nos auditeurs viennent de tous les territoires de France. Nous avons même une auditrice de Guyane !

L’UE Innovation publique est, quant à elle, ouverte en cours du jour, le vendredi tous les 15 jours de mars à juin. De dimension généraliste, elle vise à présenter un paysage d’ensemble sur l’innovation publique. Éléments théoriques et cas pratiques seront présentés via les interventions d’experts réputés sur cette question, qu’ils soient professionnels ou professeurs du Conservatoire. Cette formation s’adresse tant aux auditeurs issus de la fonction publique locale ou nationale, qu’aux praticiens du secteur privé intéressés par la partie prenante publique. Elle est intégrée au master 2 Innovation, entreprise et société et préfigure un futur master « Management public ».